Les risques de catastrophes climatiques, tels que les inondations ou la sécheresse, affectent les femmes et les jeunes filles de manière
Les risques de catastrophes climatiques, tels que les inondations ou la sécheresse, affectent les femmes et les jeunes filles de manière disproportionnée par rapport aux hommes. Ces chocs entraînent souvent des pertes financières plus importantes pour les productrices et créent ainsi une spirale de vulnérabilité et de pauvreté.
Des outils existent pour permettre aux populations de prévenir et faire face à ces risques, mais ils sont souvent conçus sans tenir compte des dynamiques de genre et sont ainsi mal adaptés aux réalités et aux besoins des femmes.
Avec le soutien financier d'Innovation Norway, UN Capital Development Fund (UNCDF) etONU Femmessoutiennent des projets digitaux innovants qui permettent de renforcer la résilience des productrices face aux risques de catastrophe et au changement climatique.
Comment sensibiliser une population faiblement alphabétisée de productrices au bénéfice de l'assurance agricole ? Comment distribuer un produit d'assurance agricole digitale à une population qui ne possède pas de smartphone ? Comment rentabiliser un produit d'assurance agricole sur des parcelles de moins d'un hectare ? Voici quelques une des questions sur lesquelles UNCDF et ONU Femmes ont travaillé ensemble.
Le contexte dans lequel les productrices évoluent dans de nombreux pays en développement n'est souvent pas compatible avec les intérêts de rentabilité et les modèles d'affaires des professionnels de la gestion et du financement des risques de catastrophes : les superficies cultivées par les femmes sont trop petites, les canaux de distribution trop coûteux, et les besoins en formation des productrices trop importants.
Bien qu'il existe de nombreux mécanismes de financement et de transfert de risque de catastrophe visant à réduire la vulnérabilité des personnes et des collectivités (tels que l'assurance, la réassurance, ou encore le crédit agricole) ou de prévention du risque de catastrophe (systèmes d'alerte, formations sur les bonnes pratiques agricoles, etc.) visant à augmenter le niveau de préparation des communautés, ceux-ci ne bénéficient pas toujours aux populations féminines, qui sont moins bien représentées dans les instances de décision et pôles d'information de ces communautés.
En partenariat avec l'UNCDF et avec le soutien financier d'Innovation Norway, ONU Femmes a mis en œuvre un programme de recherche et d'appui aux innovations digitales visant à exploiter le potentiel des innovations et des technologies mobiles et numériques pour renforcer la résilience des femmes rurales face au changement climatique.
La phase de recherche a permis d'identifier les besoins prioritaires des femmes productrices en termes de protection contre les risques climatiques dans cinq pays : Haïti, Libéria, Malawi, Mali et Sénégal. Elle a également permis de réaliser une cartographie des solutions et des innovations existantes ayant le potentiel de répondre à ces besoins et renforcer ainsi la résilience des femmes agricultrice. Ce travail a été complété par un processus innovant de dialogue avec le marché, à travers une série d'ateliers virtuels, qui a permis de présenter les besoins identifiés auprès des femmes à plus de 150 participants issus du secteur privé, de gouvernement, d'organisation internationales et de la société civile, et d'identifier ensemble des solutions potentielles pour renforcer la résilience des femmes à travers les technologies numériques et des approches innovantes.
La phase d'appui aux innovations a ensuite permis d'identifier et d'accompagner deux partenaires du secteur privé dans deux pays pilote : il s'agit de Viamo au Sénégal et d'OKO au Mali. L'assistance technique a été adapté aux besoins des partenaires et fournie parWRMS, une entreprise spécialisée dans la gestion des risques dans l'agriculture.
Former le productrices à l'assurance de façon ludique et interactive au Sénégal
Viamo, le partenaire principal du projet au Sénégal, conçoit avec des partenaires de terrain (organisations agricoles, autorités locales, assureurs) des contenus de formation ludiques et accessibles avec n'importe quel type de téléphone mobile.
Les femmes agricultrices au Sénégal sont confrontées à des pertes de revenus récurrentes dues aux catastrophes naturelles et aux chocs climatiques. Bien que certaines agricultrices aient déjà bénéficié d'une assurance-récolte par le passé, l'analyse des besoins a permis de constater que l'assurance reste mal comprise et la demande reste faible chez les femmes.
Pour répondre à cette situation et accroître l'adoption de l'assurance agricole parmi les productrices de riz de la Vallée du Fleuve Sénégal (bénéficiaires du programme d'autonomisation économique AgriFeD d'ONU Femmes), deux produits ont été conçus avecViamo: un jeu audio interactif pour sensibiliser les productrices aux enjeux de la protection contre les risques de catastrophe, et une formation audio plus complète permettant d'avoir accès à des informations détaillées sur ces risques, mais également sur l'offre locale en matière d'assurance agricole.
En moins de 9 mois, plus de 1600 femmes ont participé à la formation et ont manifesté un grand intérêt pour ce format qui leur permet de recevoir l'information sur leur téléphone, en langue locale (Wolof ou Pulaar), de manière conviviale, au moment où elles sont disponibles. Ce dernier aspect est très important, car les femmes rurales ont une charge de travail (domestique et professionnelle) très élevée et les formations traditionnelles affectent leur emploi du temps. En fin de formation, 52% des femmes interrogées estimaient bénéficier de meilleures connaissances des risques liés à la production agricole, des mécanismes, produits et tarifs d'assurance.
L'identification et l'animation des organisations de femmes agricultrices est un facteur clé de succès pour ce type de campagne de sensibilisation. Viamo Sénégal a bénéficié de mises en relation avec des organisations partenaires d'ONU Femmes dans la région de Saint Louis, notamment le Réseau des Femmes Agricultrices du Nord (REFAN), ce qui a facilité la dissémination rapide des contenus de formation.
La Compagnie Nationale d'Assurance Agricole du Sénégal (CNAAS), qui a travaillé aux cotés de Viamo, a supervisé le contenu des formations et le jeu interactif en vue d'une éventuelle réplication et mise à l'échelle de l'intervention.
Des produits d'assurance agricole numérique adaptés pour les agricultrices au Mali
OKO fournit des produits d'assurance indicielle aux agriculteurs des pays d'Afrique subsaharienne accessibles via le téléphone mobile (code USSD, application mobile) ce qui lui permet de servir des populations reculées et non bancarisées.
Dans le cadre de ce projet,OKO a mis en place un produit d'assurancepour protéger la culture de l'arachide des pertes liées à la sécheresse et aux inondations ; une production où les femmes maliennes sont très présentes. Ce produit a permis de renforcer la résilience des femmes agricultrices dans les régions de Koulikoro, Ségou, Sikasso bénéficiaires du programme d'autonomisation économique AgriFeD d'ONU Femmes au Mali.
Aux difficultés rencontrés face aux risques de catastrophe, s'ajoutent pour les femmes productrices maliennes : un faible niveau d'alphabétisation, des compétences numériques et financières limitées et des connaissances limitées en matière d'assurance, un accès et une possession limités de téléphones portables, une offre limitée de produits financiers et d'assurance adaptés. C'est pourquoi OKO a conçu un produit d'assurance spécifique pour ces femmes maliennes.
Cette offre spécifique inclut une équipe commerciale 100% féminine pour aller à la rencontre des femmes productrices et faciliter le dialogue. Tous ces agents ont été sensibilisés aux besoins spécifiques des femmes productrices, y compris leurs contraintes en termes d'emploi du temps dues à leur charge de travail rémunéré et domestique. Cette initiative a été un succès puisque l'équipe commerciale féminine a enrôlé 3 fois plus de femmes que les équipes commerciales mixtes.
OKO a également conçu un produit spécifique pour les plantations d'arachides, qui est une production majoritairement gérée par des femmes. Le succès de ce produit d'assurance a été immédiat : 73% des bénéficiaires de ce produit sont des femmes, contre 18% en moyenne sur les produits d'assurance des autres productions.
Cette approche sensible au genre et aux besoins des femmes a permis d'avoir un impact sur l'accès des femmes à l'assurance et sur les ventes globales : en moins de 9 mois, OKO a enrôlé 1100 nouvelles agricultrices, des agricultrices qui ont pu accéder pour la première fois à une assurance agricole et qui pourront mieux faire face aux risques de sécheresse et d'inondations dans la prochaine campagne agricole.