Le 1er juin 2017, les États-Unis ont imposé des sanctions ciblées à l'encontre du chef de la «Maison militaire» du Président Joseph Kabila de la
Le 1er juin 2017, les États-Unis ont imposé des sanctions ciblées à l'encontre du chef de la «Maison militaire» du Président Joseph Kabila de la République démocratique du Congo, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Les États-Unis ont également imposé des sanctions à l'encontre d'un complexe touristique appartenant au conseiller en périphérie de la capitale, Kinshasa.
Ces mesures des États-Unis surviennent peu de temps après les nouvelles sanctions ciblées annoncées par l'Union européenne le 29 mai à l'encontre de huit hauts responsables et du chef d'une miliceimpliqués depuis longtemps dans de graves abus en RD Congo. Les sanctions consistent en des interdictions de voyager, des gels d'avoirs, et une interdiction de mettre des fonds ou des ressources économiques à la disposition des personnes et de l'entité inscrites sur la liste, ou de se livrer à des transactions avec elles.
«Les nouvelles sanctions ciblées de l'UE et des États-Unis à l'encontre de hauts responsables congolais et d'intérêts commerciaux envoient un message puissant: la répression violente menée par le gouvernement à l'encontre d'activistes, de journalistes et de l'opposition politique a un coût élevé », a déclaréIda Sawyer, directrice pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. «Les sanctions indiquent que les auteurs des pires violations des droits humains et ceux qui repoussent les élections devront en payer le prix, quel que soit leur grade ou le poste qu'ils occupent.»
Le Président Joseph Kabila était censé quitter le pouvoir le 19 décembre 2016, à la fin de la limite de deux mandats prévue par la constitution, mais il s'est maintenu au pouvoir, alors que les élections destinées à élire son successeur ont été repoussées à de plusieurs reprises.
Les nouvelles sanctions américaines montrent que les intérêts commerciaux d'individus puissants impliqués dans des abus peuvent également être ciblés, a déclaré Human Rights Watch. En 2016, les États-Unis avaient sanctionné sept hauts responsables du gouvernement et des forces de sécurité. Les nouvelles sanctions de l'Union européenne frappent des personnes plus haut placées du gouvernement du Président Joseph Kabila que les anciennes. Elles ont ciblé le chef de l'agence de renseignements, deux ministres du gouvernement, un ancien ministre et deux gouverneurs, ainsi que deux officiers des forces de sécurité et un chef de milice. En décembre 2016, l'UE avait déjà sanctionné sept officiers supérieurs des forces de sécurité.
Les États-Unis ont sanctionné le Gén. François Olenga pour son rôle à la tête de la «Maison militaire» du président, «qui supervise la Garde républicaine, une entité qui a, ou dont les membres ont, mené des actions ou des politiques qui minent les processus ou les institutions démocratiques» en RD Congo. Le «Safari Beach», un complexe touristique en périphérie de Kinshasa, a également été ajouté à la liste de sanctions «pour être la propriété ou être contrôlé par Olenga».
Dans une déclaration du Bureau du contrôle des avoirs étrangers du Trésor américain (OFAC) annonçant les nouvelles sanctions, le directeur du Bureau, John E. Smith, a affirmé: «Cette mesure contre Olenga envoie un message fort, à savoir que la persistance d'actes de violence, d'agression et de répression par l'armée congolaise contre ses propres citoyens est inacceptable. Les États-Unis sont prêts à mettre en œuvre des sanctions supplémentaires à l'encontre des personnes qui minent les processus démocratiques ou électoraux de la RDC».
L'UE a sanctionné huit responsables pour avoir «contribué, en les planifiant, dirigeant ou commettant, à des actes constituant de graves violations des droits de l'homme»: Kalev Mutondo, directeur de l'Agence nationale du renseignement ; Évariste Boshab, ancien vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur et de la sécurité ; Ramazani Shadari, actuel vice-Premier ministre et ministre de l'Intérieur et de la sécurité ; Gédéon Kyungu Mutanga, chef d'une milice ; Muhindo Akili Mundos, commandant de l'armée ; le Gén. de brigade Éric Ruhorimbere, autre commandant de l'armée ; Jean-Claude Kazembe Musonda, gouverneur de la province du Haut-Katanga ; et Alex Kande Mupompa, gouverneur de la province du Kasaï-central. Le neuvième, le ministre de la communication et des médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, a été décrit comme «responsable de la politique répressive menée envers les médias» en RD Congo, «politique qui viole le droit à la liberté d'expression et d'information et compromet une solution consensuelle et pacifique en vue de la tenue d'élections».
Dans sa déclaration annonçant les nouvelles sanctions, l'UE a exprimé sa préoccupation au sujet de la «détérioration de la situation» en RD Congo, y compris les restrictions persistantes sur «l'espace démocratique et les droits fondamentaux», ainsi que de la crise dans la région du Kasaï, qui «a atteint une ampleur exceptionnelle sur le plan à la fois sécuritaire, humanitaire et des droits de l'Homme».
L'UE a exhorté les autorités congolaises à «agir dans le respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et à initier sans retard des enquêtes sérieuses et transparentes, en parallèle d'une expertise internationale de haut niveau». Sur le plan politique, l'UE a appelé à un calendrier électoral, des «institutions de transition réellement inclusives», une mise en œuvre rapide des «mesures dedécrispation» et un « espace d'expression et de débat sans entrave».
L'UE a indiqué qu'elle suivrait de près l'évolution de la situation politique et des droits humains au cours des mois à venir et qu'elle se tenait prête à «envisager des mesures restrictives additionnelles, ou à l'inverse, d'en retirer certaines».
En juin 2016, les États-Unis ont prononcé des sanctions ciblées à l'encontre du chef de la police de Kinshasa, le Gén. Célestin Kanyama, et en septembre, à l'encontre du Gén. Gabriel Amisi Kumba, commandant de l'armée dans la région occidentale du pays, et de l'ancien inspecteur de la police John Numbi. En décembre, les États-Unis ont élargi les sanctions visant également Évariste Boshab, qui était alors ministre de l'Intérieur, et Kalev Mutondo, chef des services de renseignements.
En décembre 2016, l'UE a imposé des sanctions ciblées contre le Gén. Amisi; le Gén. Delphin Kahimbi, chef du service du renseignement militaire; le Gén. Ilunga Kampete, commandant de la Garde républicaine; le Gén. Kanyama ; Roger Kibelisa, chef du département de la sécurité intérieure de l'agence nationale de renseignements (ANR) ; le Col. Ferdinand Ilunga Luyolo, commandant de la Légion nationale d'intervention (LENI), une unité anti-émeutes de la Police nationale congolaise ; et l'ancien inspecteur de la police John Numbi.
Le Conseil de sécurité des Nations Unies a décrété des sanctions ciblées à l'encontre de nombreuses personnes et groupes armés responsables de graves violations des droits humains, principalement dans l'est de la RD Congo, mais n'a pas sanctionné de hauts responsables impliqués dans la répression gouvernementale.
Les sanctions ciblées à l'encontre des auteurs présumés d'atteintes aux droits humains semblent généralement bien accueillies en RD Congo, a déclaré Human Rights Watch. Dans une déclaration commune en date du 27 avril, 165 organisations congolaises de droits humains ont demandé une pression accrue et de nouvelles sanctions ciblées à l'encontre des hauts responsables congolais. Un nouveau sondage représentatif au niveau national, effectué par le Groupe d'Étude sur le Congo, basé à l'Université de New York, et par un institut de sondage congolais, le Bureau d'Études, de Recherches, et de Consulting International (BERCI), a conclu que 72 pour cent de toutes les personnes ayant répondu au sondage approuvaient les sanctions ciblées décidées l'an dernier par les États-Unis et l'UE à l'encontre de hauts responsables du gouvernement et des forces de sécurité.
Les annonces des États-Unis et de l'UE ont été faites à un moment où la perspective d'élections démocratiques d'ici la fin de l'année en RD Congo, comme il en avait été convenu dans un accord conclu à la Saint-Sylvestre, semble se dissiper. La coalition au pouvoir en RD Congo a remis en cause les principes fondamentaux de l'accord, qui jette les bases des élections, alors que la répression politique et les atteintes aux droits humains à grande échelle se poursuivent sans relâche, a déploré Human Rights Watch.
«Des mesures internationales plus fermes et un engagement de haut niveau sont nécessaires pour empêcher la situation en RD Congo d'échapper à tout contrôle», a déclaré Ida Sawyer. «Le Conseil de sécurité de l'ONU devrait aussi imposer de nouvelles sanctions ciblant les personnes les plus responsables d'abus, tandis que l'Union africaine et les dirigeants régionaux devraient exercer des pressions sur le gouvernement de Kabila pour qu'il mette fin aux abus et organise d'urgence des élections crédibles.»